samedi 24 août 2013

Une synthèse de l'art de Yoshitoshi Japon amoureux


Fiertés d'Edo, Juillet


Pièce d'une série qui couple un portrait de courtisane à un mois de l'année, le mois de Juillet est intéressant à plusieurs titres.

Tout d'abord, c'est son caractère pittoresque qui arrête l'attention : la jeune geisha se promène dans une rue d'un quartier de plaisir. L'arrière-plan présente une maison de thé avec sa structure traditionnelle : un rez-de-chaussée qui comporte l'entrée et une pièce pourvue de nattes afin de présenter les courtisanes de l'établissement. Au premier, une coursive qui sert de couloir et de terrasse, lieu de spectacle et de représentation. Dans l'estampe une jeune femme regarde les passants de la rue.

Le deuxième point concerne la technique de Yoshitoshi. Tout semble bien traditionnel, hors cette impression est un leurre : le mois de juillet présente une technique moderne.
Ainsi, l'utilisation des violets et du bleu de Prusse est une utilisation de couleurs assez nouvelle; les premières couleurs chimiques que les artistes utilisent. De même, si l'on regarde l'homme à l'éventail du second plan, on s'aperçoit qu'il est de face, manière de représenter toute nouvelle et empruntée à l'Occident.

Enfin, c'est la présence d'une estampe qui nous intéressera. Ainsi est mise en scène une estampe à l'intérieur d'une estampe. Cette mise en abyme permet de se rendre compte de l'utilisation de son support au quotidien dans la société nipponne. De plus, l'estampe représentée, objet de frayeur pour le personnage, fixe les regards des personnages et du spectateur. Il est curieux de s'apercevoir que ce sujet (une vieille femme qui par cupidité ouvre une malle maudite, histoire tirée d'un conte) sera traité par Yoshitoshi la dernière année de sa vie dans la série 36 fantômes modernes.
A vous de comparer les deux :



Ce sujet à la fois comique et effrayant, surnaturel et expressif, synthétise bien l'art de Yoshitoshi et préfigure cette mort qui va s'emparer de lui. De même, la présence de la lune, si importante dans son oeuvre semble éclairer cette scène et rappeler le poème mortuaire de l'artiste :
Tournant le dos à la nuit
De son impressionnante brillance
ô la lune d'été

Ainsi ce mois de Juillet des Fiertés d'Edo rassemble-t-il tout l'art de Yoshitoshi : modernté et tradition, thèmes de la femme, du surnaturel et du quotidien, le tout à la lueur d'une pleine lune d'été, astre qui révèle et engloutit le monde de l'Ukiyoe.

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